Valeur ajoutée et stratégie de rémunération sur ma ferme
Table des matières
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Avant-propos
A la suite des contenus qui ont permis de comprendre la démarche générale et les trois approches habituellement utilisées en comptabilité agricole, qu’en est-il de la rémunération sur la ferme?
L’objectif de cette dernière fiche est de prendre de la hauteur sur le système de la ferme et de mobiliser la notion de valeur ajoutée telle que développée par les agriculteur∙rice ∙s des CIVAM (et non telle que définie pour la TVA).
L’objectif est également de partager des éléments de réflexion sur la stratégie choisie selon ses objectifs et le contexte propre à chaque ferme.

Ce contenu se base sur le travail réalisé par les CIVAM, Centres d’Initiatives pour Valoriser l’Agriculture et le Milieu rural. Un de leurs objectifs est de soutenir une agriculture autonome et économe en renforçant l’autonomie des personnes.
Leur approche économique est résumée dans une vidéo disponible en cliquant ici.
Valeur ajoutée et stratégie de rémunération
La ferme et son système
Prenons quelques secondes pour réfléchir : de quoi se compose ma ferme?
- Les cultures, les prairies, les animaux qui nécessitent des bâtiments, infrastructures et terres agricoles (en location ou en propriété) et qui interagissent entre eux (le fumier est épandu sur les cultures et prairies, qui nourrissent en partie le bétail…);
- Un∙e agriculteur∙rice qui fait tourner l’ensemble, en utilisant voire en optimisant les processus biologiques (air, eau, soleil, photosynthèse…);
- Les intrants, les biens et services qui entrent sur la ferme et sont consommés;
- Les productions, les biens et services qui sont produits sur la ferme et qui en sortent;
- Les aides auxquelles a droit l’agriculteur∙rice en fonction des activités présentes sur la ferme et des services écosystémiques rendus.
La vision d’une ferme proposée ici est la suivante :
La ferme, c’est avant tout un∙e agriculteur∙rice qui mobilise la terre et le capital (les facteurs de production) pour faire tourner les activités de la ferme. Il∙elle consomme des biens et services en vue d’en tirer une production.

En se basant sur ce schéma, différentes stratégies et leurs implications peuvent être envisagées pour augmenter le revenu agricole.
- Une première stratégie, fréquemment mobilisée, consiste à augmenter les produits de la ferme en augmentant le volume des productions agricoles. Cette augmentation de la production est réalisée en augmentant le recours aux intrants.
- Une autre stratégie consiste en l’augmentation du revenu en maintenant le niveau de production mais en diminuant les intrants consommés. Le tout en mobilisant au mieux les processus biologiques.
Ces deux exemples reprennent deux stratégies différentes, mais des nuances existent et sont présentes sur le terrain. Avant d’aller plus loin, il est intéressant de se questionner :
Et vous, en se basant sur ce schéma et sur votre vision de votre ferme, quelle stratégie mettez-vous en place?
La valeur ajoutée comme indicateur de performance du système
Pour aller plus loin dans la réflexion de sa stratégie et de ses impacts sur la rémunération, la notion de Valeur Ajoutée a été développée par les CIVAM dans le cadre d’accompagnement de réseaux de fermes.
La valeur ajoutée, c’est l’argent restant sur la ferme les ventes encaissées après avoir payé les intrants. Autrement dit, ce sont les produits d’activités moins les charges d’activités*.
VA = PA - ChA
*Voir les notions du compte de résultat dans la fiche sur l'approche économique.
Au vu du contexte wallon, on pourrait intégrer les primes dans les produits d’activités, ou du moins les primes liées au second pilier de la , au vu de leur statut de services écosystémiques rendus.
En prenant du recul sur la situation, l’idée est de se demander : pour 100 € qui entrent dans la ferme, combien d’argent reste dans le système ? Car l’argent qui reste sur la ferme peut être utilisé pour payer du capital et rémunérer l’agriculteur∙rice. Cette notion est calculée en divisant la valeur ajoutée par le produit des activités. On obtient ainsi un solde d’efficience de la ferme.
Pour augmenter la valeur ajoutée et le solde d’efficience, différents leviers sont possibles : diminuer le coût des intrants (biens et services) notamment en renforçant les processus biologiques. En incluant les aides dans le calcul, on peut également entamer une réflexion pour les optimiser sur la ferme.
Rémunération et triangle décisionnel
La rémunération est abordée à différents endroits des approches de pilotage de la ferme : via les prélèvements privés et le revenu disponible, via la trésorerie qui doit prévoir ces prélèvements, via le bilan financier qui peut faire état d’une augmentation des immobilisations (achat de terre, construction de bâtiments…).
Alors que faut-il regarder? Tout dépend des objectifs. Et justement, se fixer ses propres objectifs est une étape importante, souvent négligée. Ces objectifs peuvent être de différentes natures :
- Les prélèvements privés, le salaire mensuel versé
- Les avantages en nature (paiement de postes privés via la ferme)
- Augmentation de cheptel
- Construction de bâtiments
- …
Ces objectifs de rémunération concernent la ferme et sa viabilité, et se retrouvent en tension avec la vivabilité pour l’agriculteur∙rice (charge et pénibilité du travail, stress…) et les valeurs jugées importantes par l’agriculteur∙rice en fonction du contexte.
L’équilibre entre ces trois points de tension est personnel et varie avec le temps :
- Je souhaite augmenter mon revenu, avec quelles conséquences sur ma charge de travail? Ma ferme reste-t-elle en cohérence avec mes valeurs?
- Je souhaite modifier certaines pratiques pour renforcer la cohérence avec mes valeurs, quelles sont les implications sur mon revenu? Sur la charge de travail?
- Je souhaite diminuer ma charge de travail, quels impacts sur mon revenu et sur mes valeurs?
L’objectif de cette vision est de mettre en lumière les tensions qui peuvent exister entre différentes composantes. Bien qu’aucune solution générale ne peut être formulée, ces composantes et les éventuelles tensions peuvent être visibilisées et intégrées dans une approche plus systémique.
On peut alors parvenir à l’identification de pertes acceptables de l’une ou l’autre composante, pour atteindre des objectifs fixés.
Par ailleurs, il est évident que chaque agriculteur, chaque agricultrice, pose ses propres objectifs et trouve cet équilibre en fonction des compromis qu’il ou elle est prêt∙e à faire.